
Le rôle de community manager a connu une ascension sans cesse croissante depuis le début des années 2010, faisant suite à l’émergence des réseaux sociaux. Un métier qui est devenu emblématique dans les sphères du digital, mais qui reste encore mal compris et/ou sous-estimé. Notamment par des dirigeants qui ne mesurent pas pleinement l’étendue de ses missions.
Aujourd’hui, avec la croissance rapide des technologies et notamment l’intelligence artificielle, entrainant au passage de nouveaux besoins et attentes des marques et des entreprises, une question légitime se pose : le rôle du community manager pourrait-il être remplacé ? Et si c’est le cas, par quel autre profil ?
Une interrogation à double tranchant, car elle peut sous-entendre à la fois la disparition du CM et la réinvention (totale) de ses fonctions.
Le community manager : un rôle devenu fourre-tout !
Avant de parler remplacement, il faut avant tout comprendre ce qu’est devenu réellement le rôle de community manager aujourd’hui. En dehors de la simple publication de posts sur les plateformes sociales, en recourant de plus en plus aux outils d’automatisation, c’est plus l’appellation de « rôle fourre-tout » vers laquelle on tend à ce jour.
Le community manager en 2025 et depuis déjà quelques années, se fond dans des rôles multiples de stratège, de créatif, d’analyste, de modérateur, de rédacteur web, de photographe, de monteur vidéo, de webmaster, etc. (car la liste pourrait encore être très longue)
Rien de vraiment gratifiant en somme, car un touche-à-tout n’est jamais pas une personne reconnue comme experte. Le community manager navigue entre :
- La gestion des communautés,
- La création de contenu,
- Les veilles à mener,
- L’e-reputation à soigner,
- Les reporting et bien d’autres tâches qui remplissent sans aucun problème ses journées.
Cependant cette polyvalence du CM, sollicitée directement ou indirectement par les entreprises, ne reflète plus le rôle que l’on a connu et qui a été défini avec des frontières. C’est un poste qui apparait comme flou aux yeux des recruteurs, alors qu’il était majoritairement compris durant la période post-covid.
Ce qui a jeté le trouble sont les multiples attentes émanant des entreprises concernant les compétences du CM. Notamment autour de la créativité, du montage vidéo comme de l’audio avec le retour du podcast, sans parler du SEO et bien entendu la montée fulgurante de l’IA.
On ne sait même plus ce qu’est réellement un community manager en 2025 ou ne serait-ce que connaitre l’étendue de ses compétences !
A terme, ce flou pourrait laisser entrevoir des métiers de substitut dans le digital, ou des rôles mieux définis pour répondre à des besoins parfaitement identifiés.
Allons-nous vers une dilution du rôle du CM ?
Le rôle du community manager pourrait-il être réparti dans d’autres métiers du digital ? C’est déjà le cas dans certaines entreprises où la taille de l’équipe permet de mieux répartir les missions. Cependant toutes les marques et entreprises qui souhaiteront la personne à tout faire, se tourneront vers le CM. C’est à mon sens une vision qui est dégradante pour ce métier phare.
Voici 3 typologies de profil qui pourraient absorber en partie les missions du CM :
1. Le social media manager
Un rôle souvent attribué à tort au community manager dans certains cas, et malheureusement mixé avec lui lors des études de rémunérations des métiers du digital. Le social media manager est un profil stratège quand le CM est exécutant en terme de comparaison. Il est vrai que le CM peut faire de la stratégie (de base) quand il travaille pour des petite structures, mais ce n’est pas un profil stratège avec toute la dimension que cela implique.
Pour commencer le salaire du community manager est deux à trois fois moins élevé que celui du social media manager, surtout si ce dernier travaille au sein de grand groupe. Il aura de plus des responsabilités managériales, ce que n’a aucunement le CM.
La dimension stratégique ne se limite pas à créer une stratégie, mais d’avoir une vision globale en intégrant la parfaite connaissance d’un marché, de ses cibles, d’être capable d’adapter sa communication, etc. Le CM fera occasionnellement de la stratégie mais elle se limitera au choix des plateformes selon diverses contraintes.
Le social media manager va concevoir un plan d’action de A à Z, définir des objectifs, piloter la ligne éditoriale et analyser la performance des résultats. Au sein des grandes entreprises, il délèguera le déploiement de son plan stratégique au CM.
Si certaines entreprises préfèrent confier les deux rôles à une seule et même personne c’est pour éviter de payer le CM à sa juste valeur. C’est pourquoi il n’est jamais bon de se vendre comme un mouton à cinq patates, il faut toujours avoir une expertise saillante.
2. Le content manager
Le content manager est un autre rôle qui prend de l’importance avec un focus sur la partie contenu. Il est donc axé sur la production de contenu (texte, vidéo, audio et visuel), il peut aussi prendre en charge la partie éditoriale du community manager.
Il travaille en lien étroit avec différents services tels que la communication, le marketing et le SEO, pour produire du contenu à forte valeur ajoutée et potentiellement indexable. Si une marque se concentre sur la création de contenu de marque ou brand content plutôt que sur l’animation communautaire gérée par le CM, alors le content manager pourrait ici absorber une partie des tâches du CM.
SI on ajoute à cela des compétences sur l’utilisation des IA, le content manager aurait le profil parfait pour créer du contenu à forte valeur ajoutée, là où le CM n’aura pas toujours les compétences. Certes avec le temps et de l’expérience acquise au fil des années, le CM a tout intérêt à se spécialiser pour faire valoir un axe majeur, plutôt qu’un rôle à tout faire !
3. Le customer care manager ou responsable de la relation client
Le service client est indispensable pour toute société qui se respecte, souhaitant développer une relation durable avec sa clientèle. Cependant à l’ère des réseaux sociaux et de la migration des consommateurs vers ces canaux, il est devenu indispensable de suivre le rythme et d’y gérer la relation client en direct.
Certaines entreprises allant même jusqu’à rendre plus importante la relation client sur les réseaux sociaux que la gestion communautaire. Le rôle du responsable de la relation client devient alors central, avec pour mission de satisfaire le client. Il sera dés lors appelé à :
- Répondre aux messages,
- Modérer les commentaires,
- Traiter les sollicitations diverses et les réclamations,
- Gérer les avis en ligne sur l’ensemble des plateformes.
Les interactions avec la communauté sont davantage perçues sous l’angle du suivi et du SAV. La dimension social media étant plutôt secondaire. De ce fait un community manager n’est pas forcément la personne idéale pour ce poste, d’autant plus qu’il faut être armé d’une forte personnalité dans certains cas. Notons tout de même que de nombreux CM endossent ce rôle mais pas forcément à temps plein.
La croissance de l’intelligence artificielle et des outils d’automatisation
On ne peut plus ignorer la montée en puissance des IA conversationnelles ainsi que des outils de génération de contenu automatisée. Ces solutions permettent de répondre aux messages, de programmer ses publications, de générer des idées de contenu et même de produire des visuels si on use d’une IA entièrement dédiée.
Cependant même si les IA ne remplacent pas le facteur émotionnel ou l’humain quand cela s’avère nécessaire, il faut tout de même considérer la course à la réduction des coûts. Ainsi certaines entreprises opteront davantage pour ces outils, sous la responsabilité d’un profil expert formé sur les IA.
Le rôle de CM n’est donc plus nécessaire, si on fait ici focus sur le prisme « réduction de cout » et « automatisation ». Dans ce cas, il en ressort peu à peu que le CM mériterait une évolution ou une refonte de son rôle à l’ère des IA de prime abord et des besoins et attentes des entreprises qu’il ne faut pas négliger.
Plutôt qu’un remplacement, pourquoi pas une évolution ?
Il ne s’agit pas forcément de remplacer ou d’éviter le community manager, mais plutôt d’adapter son rôle à de nouvelles attentes et besoins. Le CM de demain sera le profil avec une expertise de fond et des compétences attendues sur un domaine spécifique. Nul besoin de tout savoir faire, mais d’être un véritable expert dans un domaine avec toujours la maitrise des IA.
Du reste le CM devra aussi :
- Maîtriser davantage la stratégie de contenu,
- Saisir les enjeux de la data et de la performance / ROI,
- Maitriser et intégrer les IA dans son quotidien (outils d’automatisation et de création),
- Collaborer et travailler en transverse avec d’autres profils digitaux spécialisés.
Le community manager est un métier à la frontière d’une mutation, mais trop de personnes tentent de le tirer vers le bas, alors qu’il est sensé passer à un niveau supérieur.
Ce qu’on observe, c’est un changement vers des profils qui sont plus spécialisés et/ou plus stratégiques. Tout en considérant les objectifs des entreprises qui parfois diffèrent grandement. L’avenir du CM passera sans doute par de la montée en compétence, de l’agilité et une vision plus globale du digital.
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Non le rôle de community manager ne va pas encore disparaître, mais il devra se transformer. Pour celles et ceux qui aiment ce métier, c’est une réelle opportunité de pouvoir se repositionner et de s’affirmer comme un acteur majeur de la stratégie digitale.
Avec une maitrise des IA et des compétences en lien direct avec les attentes et besoins des entreprises, le CM répondra plus finement aux exigences du marché et rendra son rôle encore plus pérenne.